Editions : The Project Gutenberg, gratuit, diffusion libre

Synopsis
New York, XIXème siècle.
Notre bon narrateur entouré d’employés caractériels travaille dur dans son étude. La soigneuse routine entretenue par le notaire et ses subalternes s’effrite au contact d’un nouvel employé : Bartleby. D’abord apprécié par son employeur, le scribe refusera un jour de collationner ses écrits, c’est le début d’une série de nouveaux refus…
Pourquoi cette nouvelle ?
J’ai choisi cette année un cours de langue appliquée aux lettres, concrètement ça implique de lire et commenter des œuvres en langue originale. Malgré de multiples tentatives de ma part durant la licence, j’ai toujours eu beaucoup de difficultés à lire en VO, on peut donc dire que choisir ce cours en toute connaissance de cause était faire preuve d’une sorte de masochisme je crois…
Finalement ce cours, loin d’être la torture que je m’étais initialement imaginé, me plait assez. C’est une façon agréable de terminer la semaine même si cela me demande beaucoup d’efforts pour améliorer mon médiocre niveau.
Bartleby the Scrivener était la première nouvelle de notre programme et l’envie m’est assez naturellement venue d’en parler un peu par ici. Pour être certaine d’en comprendre tous les tenants et aboutissants, j’ai fait le choix de lire une première fois le texte en anglais, puis en français, puis à une dernière fois en comparant les deux versions.
Le roman
Mon premier contact avec Melville remonte à l’enfance, j’ai lu le très fameux Moby Dick qui ne m’a pas laissé un souvenir impérissable. Oui je sais sacrilège, tout ça tout ça… Commencer l’année avec un auteur auquel je n’avais pas accroché plus que ça dans mes jeunes années me séduisait plutôt moyennement et c’est peut-être pour cette raison que Bartleby m’a fait l’effet d’une bonne claque.
Se déroule donc au fil du récit l’histoire d’un homme qui décide de s’arrêter. S’arrêter de copier, de parler, de travailler, de manger… s’arrêter à quel point ? L’infinie politesse du scribe est désarmante pour le lecteur autant que pour le narrateur qui affronte le leivtmotiv de son employé “I would prefer not to” avec pitié et colère alternativement, incompréhension la plupart du temps.
Cette nouvelle est très courte, grinçante et violemment drôle. La tension monte crescendo jusqu’à la chute. A titre personnel j’ai trouvé que l’écriture était particulièrement efficace, et arriver à lire la nouvelle en version originale m’a aidé à saisir au plus près la maîtrise technique de Melville – détail qui m’avait sans doute plus qu’échappé à la lecture de Moby Dick étant donné mon jeune âge à l’époque.
Cette nouvelle terriblement absurde et tout aussi énigmatique a donné lieu à de multiples tentatives d’interprétation. Le comportement de Bartleby est-il dépressif, philosophique, politique, métaphysique ? Doit-on rire ou être saisi de tristesse ? Quelle dimension de l’existence humaine cache cette obstination au refus ? Que refuse exactement Bartleby ? Est-ce que ne se pose pas aussi la question de la vie en société et de la marginalité ?
La superposition des tons narratifs apporte d’incroyables nuances au récit et laisse le lecteur désorienté à l’image du narrateur/spectateur. L’auteur ne nous tient pas par la main et le mystère demeure finalement entier, laissant à chacun le soin d’apporter sa réponse propre.
C’est à cela sans doute que tient le succès de cette formidable nouvelle : Melville oblige le lecteur à réfléchir au destin de Bartleby, et le confronte ainsi à lui-même.
En bref :
La lecture de cette nouvelle ne peut, à mon sens, laisser personne indifférent. On se laisse happer par ce narrateur léger qui mine de rien connait son affaire, nous voici tour à tour souriant puis le cœur serré.
La brièveté du texte ne peut que me pousser à le recommander, d’autant qu’il est possible de le télécharger légalement et gratuitement sous différents formats sur le site du Projet Gutemberg.
A titre personnel je le prends au format epub, compatible avec Adobe Digital Editions que j’utilise comme liseuse sur mon ordinateur.